En 2019, L'Espace le 4e a accueilli pendant quelques mois l'exposition Data Detox réalisée par la Bibliothèque de l'EPFL. Durant cette période, vous avez peut-être participé à un de nos ateliers Data Detox.
Cette année encore, l'Espace le 4e vous proposait d'explorer ensemble les données personnellesen 3 épisodes : Mon smartphone Petit Poucet des temps modernes [1/3] ; Des applications un peu trop gourmandes [2/3] et Cookies et bulles de filtres ou la cuisine des GAFAM [3/3]. L’objectif de ces trois épisodes est de comprendre les données personnelles et leurs enjeux, ainsi que de fournir quelques bonnes pratiques à adopter si vous le désirez.
À travers ces articles, nous allons découvrir :
Nous allons discuter dans ces trois épisodes de toutes les données qui sont collectées avec notre consentement. Nous ne discuterons pas d’aspects liés à la sécurité de notre vie numérique tels que le hacking.
Les données personnelles sont toutes les traces que nous laissons sur le web par le simple fait d'utiliser d'avoir un appareil qui y est connecté. En ouvrant une application, en faisant une recherche sur Google ou en consultant la météo en ligne, nous produisons des données. Ces services web enregistrent des éléments concernant l'usage qu'on en fait : l'heure à laquelle on s'est connecté, le type d'appareil qu'on utilisait, l'emplacement géographique où on se trouvait et bien d'autres éléments sont capturés.
Une donnée personnelle isolée n’a pas beaucoup d’impact. Que Google sache que je fais régulièrement des recherches concernant les Bibliothèques municipales n’a que peu d’importance en soi. Mais le soucis principal des données personnelles, c’est l’exploitation de celles-ci. En effet, la capacité d’analyse des algorithmes permet aux entreprises et services variés de croiser toutes les traces que nous laissons en ligne pour construire notre profil numérique et ainsi connaître nos habitudes, nos envies, nos croyances et bien d’autres. Cela permet notamment aux plateformes web de nous proposer du contenu qui nous plaît.
Tout ce que nous faisons en ligne laisse des traces, surtout si l’on ne prend aucune précaution. Ces traces sont monétisées par les plateformes web. Des entreprises peuvent acheter nos données auprès de tous les services en ligne que nous utilisons pour mieux cibler nos envies ou potentiels besoins de consommation notamment. L’enjeu principal dans notre usage quotidien du web est que nous fournissons constamment et gratuitement des données qui sont monétisées à notre insu par les entreprises telles que Google, Apple, Facebook, Amazon ou Microsoft (GAFAM). Notre profil numérique, construit par les algorithmes à partir des données collectées lorsqu'on utilise internet, est la matière première commercialisée par des acteurs tels que les data brokers.
La géolocalisation est une des données fréquemment collectées sur notre smartphone par les applications et services web que nous utilisons.
De nombreuses applications de notre smartphone utilisent la géolocalisation à notre insu ou pas. Pour certaines applications, c’est très pratique ! Par exemple, pour trouver un restaurant indien proche de ma position actuelle ou pour se rendre à une adresse dans un quartier que l’on connaît pas très bien. Pour d’autres applications, connaître notre position actuelle n’est pas utile pour son fonctionnement mais c'est une donnée qui est potentiellement vendue à des services web tiers ou à la marque de notre smartphone.
Un documentaire de 2016 s'intitulant Harvest illustre la gourmandise des applications de notre smartphone en matière de localisation géographique. Il a déterminé qu’en une semaine le smartphone de Jenni a partagé 3545 fois sa position GPS à ses applications. Les applications, utilisées ou pas par Jenni, interrogent toutes les deux minutes son smartphone en lui demandant « où est Jenni ? », « où est Jenni ? », « où... ?».
La fonction de localisation n'est pas nécessaire pour le fonctionnement de certaines applications. Une application pour prendre des notes n'a pas besoin de savoir où nous nous trouvons pour fonctionner. Sur votre smartphone, vous pouvez donc autoriser ou refuser l'utilisation de la fonction de localisation pour chacune des applications que vous utilisez. Voici la marche à suivre.
Se rendre dans les Réglages de son iphone, puis cliquer sur Confidentialité
Cliquer sur Service de localisation
On trouve la liste de applications. Pour désactiver le service de localisation d'une application en particulier, cliquer dessus.
On peut choisir une des options pour le service de localisation : désactiver la localisation (jamais), activer la localisation (toujours) ou activer la localisation uniquement quand vous utilisez l'application (lorsque l'app est active).
Se rendre dans les Paramètres de son smartphone et cliquer sur Applis et notifications.
Cliquer sur Autorisation des applications.
Cliquer sur Localisation.
La liste des applications utilisant la fonction de localisation s'affiche. Vous pouvez activer ou désactiver cette fonction.
D'autres réglages supplémentaires liés à la géolocalisation de votre smartphone sont présentés dans la brochure Data Detox.
La fonction de localisation n’est pas l’unique méthode utilisée par notre smartphone pour savoir où nous sommes en tout temps.
Pour chaque recherche Google effectuée, pour chaque emoji envoyé ou contenu publié sur un réseau social, notre smartphone communique avec les antennes de réseau mobile les plus proches de notre localisation géographique. Notre fournisseur de réseau (Swisscom, Salt, …) est donc capable d’archiver nos déplacements en identifiant les antennes utilisées par notre smartphone. Même en désactivant la fonction de localisation, notre fournisseur de réseau connaît et conserve tous nos déplacements. C’est ce qui est illustré dans une animation créée par le journal Die Zeit. On découvre tous les déplacements effectués par un politicien allemand sur 6 mois grâce aux données collectées par son fournisseur de réseau.
Extrait de l'animation de Die Zeit recréant les déplacements quotidiens enregistrés par le fournisseur de réseau d'un politicien allemand
Mais notre smartphone est un Petit-Poucet encore plus efficace. Nos emplacements géographiques sont aussi enregistrés dans chaque photographie qu’on prend. C’est une des nombreuses informations automatiquement enregistrées par notre appareil, comme par exemple, la date à laquelle on prend la photo. Les signaux wi-fi constamment émis par notre smartphone, même en désactivant la fonction wi-fi, permettent aussi de connaître notre localisation.
Ces petits points géographiques enregistrés par notre smartphone peuvent paraître anodins. Mais les algorithmes arrivent facilement à croiser ces localisations avec d’autres données collectées par notre smartphone ou notre fournisseur de réseau pour reconstruire notre quotidien.
Parfois, les données de localisation des utilisateurs d’une application peuvent révéler l’emplacement de bases secrètes de l’armée américaine ! C'est le cas de l’application Strava utilisée par les militaires américains pour leurs séances de jogging. Elle a enregistré leurs trajets sportifs mais également tous leurs autres déplacements quotidiens. Un internaute a découvert l'emplacement de bases militaires américaines et françaises en plein désert grâce aux données mises à disposition par l'application Strava.
Nous pouvons maîtriser la collecte de certaines données de localisation sur notre smartphone. Pour d'autres données de localisation, notre Petit-Poucet n'est pas maîtrisable. Et puis, la géolocalisation sur notre smartphone c'est tellement pratique ! Nous pouvons tout de même trouver un certain équilibre en autorisant la localisation sur une application comme Google Maps mais désactivant la localisation pour une application qui nous aide à gérer notre liste de courses. Cela réduira un peu le nombre de traces qu'on laisse sur le web.
L'objectif de ces trois articles est de comprendre les enjeux de la collecte de nos données personnelles, même si on ne change pas complétement nos habitudes numériques.
Il existe d’autres réglages à effectuer sur son smartphone ou d’autres comportements sur le web pour limiter son empreinte géographique numérique. Pour en savoir plus, vous pouvez consulter la brochure Data Detox de l'exposition de la bibliothèque de l'EPFL.
Pour toute question concernant le sujet de cet épisode : cite-quatrieme.bmu@ville-ge.ch.
Photographie de couverture de l'article par Ingo Joseph.